Yach - Chapitre 1 - Naissance

Dans cette région reculée de Sibérie, chacun luttait pour survivre. Le froid vous glaçait jusqu'à la moelle sans aucune pitié. La pitié n'avait pas place au rang des affamés. S'isoler du froid, manger, se protéger des prédateurs, ne pas se faire manger, tel était le quotidien. Un jour que les hommes étaient partis à la recherche de nourriture et qu'il ne restait plus au campement que des femmes et des enfants, des loups, que la faim rendait encore plus intelligents qu'à l'accoutumée, attaquèrent la tribu des Ishn. Ce fut un carnage. La meute de loups égorgea, déchiqueta, dévora, et ne laissa aucun survivant, si ce n'est cet infime braillard, trop petit et gesticulant pour que les loups repus se fatiguent à l'avaler. Il avait surgit comme un diable lorsque le loup dominant avait éventré la femme. Surpris, le loup avait eut un mouvement de recul puis avait passé son chemin car d'autres morceaux de viande l'attendaient. Les loups dévorèrent autant qu'ils purent, et lorsque la viande leur eut rempli le ventre jusqu'au gosier, qu'une bouchée supplémentaire aurait risqué de les étouffer, ils étaient partis en emportant un dernier morceau entre les dents, une cuisse d'enfant par ci, un bras de femme par là. Ils étaient repus et heureux. Le loup dominant avait décidé du moment de la naissance de Yach. Des forces occultes avaient décidé que Yach vivrait. Prématuré, seul survivant, il se mit immédiatement en quête de nourriture. Pas besoin de savoir marcher, il avait tout sur place, il dévora ce que les loups avaient laissé de sa mère. La vie de Yach commençait. Après sa mère, il mangea un à un les restes des membres de sa tribu que le froid conservait parfaitement. Il acquit des forces, il grandissait rapidement. Lorsque la nourriture commença à manquer, il leva son museau en direction du vent et renifla. Le vent venait de l'est, mais son flair ne lui apportait aucune nouvelle rassurante. Il tourna les babines vers le nord, rien non plus par là-bas. Il continua vers l'ouest, toujours pas de gibier à renifler. Il partit au sud. Il courut pendant plusieurs jours puis stoppa net sa course. Yach souriait. Quelle odeur ! De la viande, beaucoup de viande. Des enfants sans défense, des femmes dodues, il les sentait. Il salivait, son visage rayonnait, de la bave coulait le long de ses robustes petites canines. Son visage se crispa, il grogna, des hommes mais surtout des chiens, beaucoup de chiens. Il renifla longuement pour mieux s'informer. Oui, sans aucun doute, les chiens et les hommes vivaient ensemble, ils se protégeaient mutuellement. La tâche était compliquée mais il ne pouvait laisser passer pareille occasion. La faim lui tenaillait les entrailles. Son attitude changea du tout au tout. Les proies étaient là. Inutile à présent de courir. Yach était seul pour chasser, il ne pouvait compter que sur lui. Il s'allongea sur le dos et se mit à pleurer. Les chiens furent les premiers à entendre les pleurs du bébé humain. Ils s'agitèrent, tirèrent sur leur laisse, aboyèrent. Bébé ou pas, c'était un intrus, et ils gardaient leur territoire contre les intrus. Les hommes prirent leur lances, revêtirent leur peaux et embrassèrent leurs femmes avec inquiétude. Dans ces contrées, tout nouvel événement était rarement de bon augure. Rien de bon ne pouvait apparaître dans cet enfer. Ils attelèrent les chiens aux traîneaux et prirent la direction des pleurs.

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