Son étonnement fut immense
lorsqu'elle surprit des regards furtifs du play-boy dans sa
direction. Toutes les filles papillonnaient autour de lui, y compris
cette Edwige qui ne faisait pas l'unanimité. Edwige, princesse des
bacs à sable, adulée par les mâles, entourée par une escouade de
jeunes filles envieuses qui espérait récupérer les miettes des
amants qu'elle refoulait en quantité industrielle, et jalousée par
les filles qui n'étaient pas parvenues à entrer dans le premier
cercle. Il fallait reconnaître qu'elle était jolie Edwige, tout
chez elle avait été conçu pour éveiller le désir. Mais son
caractère arrogant et prétentieux justifiait à lui seul qu'elle
soit détestée.
Que venait faire Emmanuelle dans
cette partie où elle ne se sentait pas de taille ? Rien ne la
distinguait des autres filles. Elle n'était pas laide, bien au
contraire, mais elle était quelconque, invisible. Elle pensait ne
disposer d'aucun argument décisif pour retenir l'attention d'un
garçon. Aussi, lorsque le coq au physique avantageux vint vers elle,
elle se liquéfia sur place, elle trembla de tous ses membres comme
une midinette s'attendant à recevoir un châtiment. Elle était
pétrifiée, incapable de tout mouvement ou de la moindre parole.
Il s'approcha très près d'elle,
plus près que ce à quoi elle était habituée. Cette proximité
accentua son trouble. Un large sourire illumina le visage d'Hérijao,
un sourire sincère, ou tout au moins qui semblait l'être, un
sourire comme une invitation, accueillant, rassurant. Un sourire
auquel on ne peut répondre que oui. Il s'adressa à elle avec
malice.
- Je parie que tu n'oses pas
m'embrasser, là, tout de suite.
Elle aurait préféré se faire
renverser par un bus. Jamais personne n'avait osé s'adresser à elle
avec des propos aussi déplacés. C'était les premiers mots qu'ils
s'adressaient. Pour qui se prenait-il ce bellâtre ? Quelques courts
instants d'éternité passèrent. Elle ne savait comment réagir.
Elle n'eut pas le temps de sortir de son état de catalepsie que
l'impossible se produisit.
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